samedi 13 juin 2009

Européennes :
Des élections qui rendent vert...


Alors que l’UMP et les Verts jouent les grands gagnants de ce scrutin, ces élections européennes sont inquiétantes : six électeurs sur dix n’ont pas voté (de quoi saper le moral quand en Belgique, on atteint les 91 %. Il faut dire que le vote y est obligatoire !). Autrement dit, les résultats enregistrés ne sont qu’un reflet de l’opinion des Français. Les raisons sont nombreuses : trop de listes, une campagne lancée tardivement, des explications peu convaincantes qui pouvaient faire penser
à un scrutin tricolore, des candidats lointains, voire inconnus, des sortants qui n’ont jamais été très bavards quant à leurs interventions à Strasbourg (quand ils y étaient), des partis européens qui portent des noms différents des nôtres puisque l’Union compte 27 pays...
Qu’importe, les formations en lice font comme si tout était parfait ! Tant pis pour les abstentionnistes, ils n’avaient qu’à se déplacer.



Les Français ont mal à l’Europe. Ils tirent de la patte, ont voté non à la constitution. Beaucoup d’entre eux hésitent à la recevoir à la maison « car elle comporte des zones d’ombre ». Et pourtant, cette Europe n’est pas leur ennemie. Elle représente une force et une monnaie qui leur ont permis de mieux résister à la crise.
Alors pourquoi la compare-t-on à une pieuvre qui gommerait le caractère des états pour les uniformiser ? Qui sont les fautifs ? Les gouvernements sans doute qui se retranchent derrière elle quand les dispositions prises heurtent les habitudes des citoyens. Et pourtant le rôle de l’Union Européenne est simple : elle assume les compétences que les états membres lui ont déléguées. Dans ces conditions, les états ne peuvent pas dire qu’ils n’étaient pas au courant !

Au fil des années, nous aurions dû devenir des Eurocitoyens dans l’acceptation du terme, en faisant passer la notion d’appartenance européenne avant la terre natale. Or, l’effet contraire s’est produit.
Les pays ont freiné des quatre fers en privilégiant les nationalismes : la reconnaissance des patois est l’un des exemples de ce retour aux villages gaulois ! La concurrence de pays à main d’œuvre bon marché a lourdement influencé les attitudes. Rappelez-vous la peur qu’inspiraient les plombiers polonais ! On aurait dit l’arrivée de Dark Vador !

Si la construction avait reposé sur des bases solides, les Etats-Unis d’Europe auraient vu le jour. En effet, sur l’échiquier international, seule une entité importante peut dialoguer efficacement avec les USA ou la Chine. S’est alors instauré un double langage, en France comme ailleurs. D’un côté, on a sorti les attributs européens les jours de grande procession ; de l’autre, on a prôné les bienfaits de rester entre ses murs.


Le résultat des Européennes 2009 est révélateur de cet état d’esprit : une majorité d’électeurs ne se sentait pas concernée. A leur décharge, la campagne a été de courte durée, l’actualité étant monopolisée par la tragique affaire de l’Airbus. L’attention des citoyens s’est alors portée sur la table ronde télévisée qui s’est transformée en règlement de compte entre Daniel Cohn Bendit, attaqué sur des écrits passés (troublants d’ailleurs) et sur lesquels il s’est déjà expliqué, dit-il (se reporter à Wikipédia, “le grand bazar“ paru chez Belfond en 1975), François Bayrou sur la défensive et Marine Le Pen dénonçant des sondages truqués. Sous le regard des autres invités, plus réservés.
Arlette Chabot, pourtant excellente journaliste, faisait une tête de quinze pieds de long et elle avait raison.

Face à ces mauvais tirs d’artillerie politique, Boris Vian aurait pu déserter une seconde fois ! Que sont devenus les tribuns, les stratèges, les géopoliticiens, les fines pensées et les judicieux analystes ? Sont-ce là les héritiers de Chirac, Mitterrand, Pompidou ou de Giscard qui possédaient l’art de l’éloquence ? Ces personnalités auraient-elles coupé tant de têtes que seule subsisterait cette cour asexuée et sans envergure, uniquement soucieuse de son avenir ? « Les gens valables sont dans le privé. Beaucoup ont baissé les bras. Les élus qui veulent garder le pouvoir préfèrent s’entourer d’un cercle inodore. C’est au moment de leur succession qu’apparaissent les vraies carences » soulignent les observateurs.
Rendez-nous la vitalité des discussions, les bonnes phrases, la subtilité des échanges ! La France actuelle serait-elle à l’image des magazines people dont on regarde seulement les images ?


Bref, cette élection européenne ne restera pas dans les annales. Que faut-il en retenir sinon la poussée très visible des partis conservateurs, une tendance à droite constatée non seulement en France, mais dans de nombreux états membres. Si le Parti Socialiste régresse, les Verts font une belle percée puisque l’écologie est dans l’air du temps ! Il est évident que le film magnifique de Yann Artus Bertrand a influencé les esprits. La Terre est en danger ? Non, ce sont les hommes qui l’habitent...

Désormais, reste à savoir si les Verts feront alliance avec la Gauche. Si l’accord aboutit, ce groupe pourrait devancer le PPE (Parti Populaire Européen) où siègeront Rachida Dati et Michel Barnier. Et dans la foulée, en France cette fois-ci, Nicolas Sarkozy prépare un remaniement ministériel. Voilà qui devrait animer les conversations dans les jours qui viennent. Une bonne façon de relancer le débat avec l’arrivée de Corinne Lepage, qui sait ?

• L'info en plus : 18,5 millions de votants sur 44 millions d’électeurs : de quoi se poser des questions ! Au niveau de l’Europe, il y aura 736 députés européens.

Photos 1, 2, 3 : le vote à Jonzac

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