samedi 24 juillet 2010

L'Académie de Saintonge
rend hommage
à Bernard Giraudeau


Nous apprenons avec tristesse la disparition de Bernard Giraudeau (63 ans) à qui notre Académie avait décerné le prix Chapsal en 2008. Déjà la maladie l’avait empêché de venir recevoir ce prix et c’est son ami, notre collègue Bernard Mounier, qui avait répondu à sa place au discours de Violaine Massenet, qui dressait de l’acteur écrivain un très beau portrait.

«  Natif de La Rochelle, petit-fils de cap-hornier, Bernard Giraudeau s’engage à quinze ans dans la Marine et il entre à vingt-trois ans au Conservatoire dont il sort avec le 1er prix de comédie. Il a tourné dans plusieurs films à succès dont “Rue barbare“ et, plus récemment, “Les Marins perdus“ d’après le roman Jean-Claude Izzo. Il a réalisé aussi, entre autres, un superbe film historique tourné au Sénégal “Les caprices d’un fleuve“.

La maladie qui l’a obligé à ralentir son rythme de comédien et de cinéaste lui a permis, paradoxalement, d’approfondir son univers le plus secret et d’arpenter, “clochard céleste“, selon l’expression de l’un de ses modèles, Jack Kerouac, les chemins de l’écriture.
Déjà auteur de recueils de nouvelles, il a publié en moins d’un an, une bande dessinée R97 illustrée par Christian Cailleaux et un roman qui a obtenu un grand succès critique et public “Les dames de nage“. Entre récit et poème, ce texte d’une grande richesse sensuelle et lyrique évoque irrésistiblement le charme troublant des poupées russes. Le talent de l’écrivain est à la hauteur de son exigence. Il désire affronter, grâce au langage, “les terres mystérieuses de la peur et de l’imaginaire“. Dans ce vagabondage inspiré, cette invitation au voyage (à toutes les sortes de voyages), il se mesure aux lointains les plus intimes comme les plus distants.

Il navigue de l’Afrique à l’Amérique du Sud, pertes et retrouvailles, initiation et désenchantement, il est cet homme perdu qui éprouve jusqu’au vertige " le tremblement sous les étoiles ". N’est-ce pas ce même sentiment d’émerveillement et de crainte mêlées qu’il ressentait enfant lorsqu’il tentait de déchiffrer les paroles étranges des adultes ? Car l’écrivain ne veut rien délaisser, il désire retenir les instants sans les figer afin de les transformer en parcelles d’éternité.

Sa voix profonde résonne juste et nous rappelle qu’il ne faut pas trop chercher à comprendre, que l’important est d’accepter de “perdre connaissance“, de s’évanouir au monde pour mieux se retrouver en lui et au-delà. Écrit “face à l’infini de la mer, la vraie, et l’indéfini du ciel“, “Les dames de nage“ sont une offrande. L’offrande d’un voyageur devenu veilleur d’un territoire à la portée de chacun où passé et présent se confondent dans une même trame, un même tissu de songe et de silence ».

Que Bernard Giraudeau repose en paix.

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