mardi 27 janvier 2015

Le Tribunal de Grande Instance
de Saintes fait face aux restrictions
budgétaires grâce au tournage
d’une série télé avec Josiane Balasko 

Faisant suite au Tribunal de Commerce, avait lieu l'audience solennelle de rentrée du Tribunal de Grande Instance. Si les résultats obtenus dans le traitement des affaires démontrent que le Palais fonctionne efficacement, les restrictions budgétaires entraînent des situations désagréables qui obligent les occupants à faire preuve d'imagination. Les Français ne manquent pas d'idées et peuvent s'appuyer sur des fonds privés. Le TGI n'échappe pas à la règle. 

Le Tribunal présidé par Stéphane Brossard
Selon la tradition, Stéphane Brossard, président, présenta les chiffres de l'année écoulée dont il dressa les grandes lignes. En activité civile, le nombre d'affaires nouvelles a progressé tandis qu'en contentieux général, le stock est descendu à 474 dossiers. En mai dernier, une convention a été signée entre le TGI et le Barreau pour développer la médiation dans le contentieux civil général. Le contentieux aux affaires familiales, quant à lui, souffre de problèmes d'effectifs.
L'activité correctionnelle reste soutenue avec 1932 saisines et 2484 décisions rendues (dont une progression des comparutions immédiates).
La Cour d'assises a jugé 18 affaires contre 14 en 2013.  Service des libertés et de la détention : La réforme relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées pour troubles mentaux a renforcé leurs droits avec la présence obligatoire d'un avocat depuis septembre dernier. Elle prévoit aussi la tenue des audiences au sein des établissements hospitaliers  : « le coût d’aménagement est tel que les hôpitaux de Saintes et Jonzac ont préféré le maintien dans notre organisation et la tenue des audiences au TGI de saintes. Cette solution satisfait tout le monde y compris les avocats » souligna le président. Ce service est tenu par Mme Revel en remplacement de Mme Cherichi.
Au tribunal des enfants créé à Saintes en 2011, Béatrice Le Ferre a remplacé Mme Lux Barel nommée à Libourne. Les locaux ont été rénovés pour accueillir la juridiction des mineurs qui se compose de deux magistrats et trois greffiers. La nomination effective du second juge devient urgente.
Tribunal d'instance de Saintes : on note une augmentation sensible du contentieux civil général et des saisines de rémunérations résultant de la crise économique.
Tribunal d'instance de Jonzac : Mme Benfrech a été nommée juge de proximité en septembre 2013, soulageant ainsi Mme Courtois qui assurait cette fonction. Les procédures de surendettement sont en forte progression ainsi que le nombre d'ordonnances pénales relatives aux infractions routières.

Le Tribunal accueille Valérie Collet, nommée vice-présidente au TGI chargée du service 
du TI de Saintes en remplacement de Mme Brieu
Des travaux de rénovation effectués grâce à une série télévisée  

Sur le nombre de postes, Stéphane Brossard dresse un constat préoccupant : s'agissant des magistrats, la France se situe en dessous des autres pays européens. Elle compte 10,07 magistrats du siège pour 100.000 habitants contre 11,2 en Italie, 24,7 en Allemagne, 19,2 au Portugal ; le chiffre médian étant 17,41. Cette situation est encore plus flagrante pour les magistrats du parquet, 2,9 magistrats pour 100.000 habitants notre 6 en Allemagne et 7 en Belgique. Même constat pour les fonctionnaires. « Cette insuffisance des moyens humains et matériels rend encore plus remarquable la bonne note obtenue par la France en matière d'efficacité, à savoir la faible augmentation des affaires non jugées » remarque Stéphane Brossard.
Les restrictions budgétaires peuvent aboutir à des situations inattendues. Ainsi, grâce au tournage de deux épisodes de la série "la loi de Barbara" avec la truculente Josiane Balasko, l'indemnité versée a permis de terminer les travaux de rénovation entrepris au Palais de justice : locaux de la régie, services du juge aux affaires familiales, salle de délibéré des jurés de la Cour d'assises et salle d'audience correctionnelle. « Les désagréments du tournage ont été largement compensés » admet le président. Il comprend toutefois qu'on puisse s'interroger sur ces nouveaux types de financement : « Les travaux du Palais avaient été stoppés faute de moyens. Dès lors, il fallait bien trouver des solutions pour ne pas mettre à mal notre indépendance et notre impartialité ». Ajoutons que la mairie a fait à peu près la même chose, M. Taillandier, responsable du Centre Leclerc de Saintes, ayant financé des travaux sur le pont Palissy.


 L'impartialité, vaste sujet 

Stéphane Brossard conclut ses propos par un sujet qui a largement défrayé la chronique en 2014, l'impartialité des juges remise en cause au nom de leur appartenance à un syndicat. On se souvient en effet de la mise en examen de la présidente du Syndicat de la Magistrature en février pour « injures publiques » par la doyenne des juges, Sylvia Zimmermann, dans l'affaire du « mur des cons », ce panneau de photos de personnalités affiché dans le local privé du Syndicat. L'affaire avait fait grand bruit.
La Cour européenne des Droits de l'Homme a posé en principe que l'impartialité peut être appréciée selon une démarche subjective ou objective :  « la démarche subjective consiste à déterminer ce que pense le juge dans son for intérieur, aucun magistrat ne devant manifester de parti pris ou de préjugé personnel ». On note également l'impartialité spéciale au traitement d'une cause déterminée et celle qui relève de la problématique des appartenances du juge en général. « Certains refusent l'impartialité idéaliste et la vision libérale du monde faisant de lui une figure neutre, un simple arbitre ».
Selon l'expression célèbre de Montesquieu, le juge est "la bouche de la loi". L'impartialité lui interdit donc de prendre partie a priori pour une cause qu'il va devoir juger, sans pour autant lui demander de s'en tenir à une position d'arbitre neutre. « L'impartialité est la condition d'un jugement éclairé. Pour être vraiment impartial, le juge doit faire abstraction dans son environnement de tout ce qui constitue sa position personnelle ; une prise de distance en quelque sorte ».
Par un discours argumenté, le président Brossard a soulevé un sujet intéressant et exprimé un point de vue avisé, fruit de son expérience professionnelle.  « Certains ont proposé l'interdiction pour le juge d'adhérer à un syndicat. Il ne me paraît pas souhaitable d'isoler le juge du contexte social dans lequel il évolue. Il doit rester libre d'exercer les activités extra-professionnelles de son choix ». Et de conclure « la notion d'impartialité illustre à elle seule la difficulté de juger »...


Le barreau de Saintes
• Comme le Tribunal de Commerce, le TGI a rendu hommage aux victimes de la barbarie.
« On cherche à atteindre les fondements de notre démocratie. Nous sortirons grandis de cette épreuve » souligne le président Brossard. « Nous avons la capacité de nous unir face à l'adversité » ajoute le procureur Coindeau. Les grands rassemblements de solidarité le démontrent.

•  « Les gens attendent tout de la justice » 

Dans son intervention, Philippe Coindeau, procureur, revint sur les faibles moyens alloués à la justice. Le dialogue entre la justice et les citoyens est parfois difficile, les affaires classées sans suite pouvant entraîner des insultes, des menaces.
Le nombre de circulaires ministérielles, lui, est à la hausse, Christiane Taubira ayant deux idées phares : la création d'un parquet départemental et un grand discours annuel de politique pénale.

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